vendredi 9 août 2013

Vila Müller

Le hasard des agendas fait que nous visitons à un jour d'intervalle deux importants témoins de l'architecture du XXe siècle. D'une part la Vila Müller à Prague (oui, vila ne prend qu'un seul "l" en tchèque) et la Vila Tugendhat à Brno, au sud-est de Prague, à deux bonnes heures de route.

L'une comme l'autre villa ne se visitent que sur rendez-vous, toujours avec un guide et en petits groupes. Autre point commun, elles sont connues sous le nom de leur premier propriétaire et maître d'oeuvre et non sous le nom de leur célèbre architecte. Voyez le site de la vila Müller : http://www.mullerovavila.cz/?q=english

Pas de photos de la vila Müller. Strictement interdit, même moyennant paiement. Chef d'oeuvre d'Adolf Loos, architecte né à Brno, à l'époque dans l'empire austro-hongrois (la Tchécoslovaquie ne naîtra qu'après la première guerre mondiale) et souvent considéré comme autrichien.


Loos lui-même considérait cette villa comme son chef d'oeuvre, réalisé à la fin de sa vie et probablement le dernier ouvrage entièrement de sa main.


L'originalité de Loos (parmi d'autres) est l'organisation de l'habitat en "raumplan" : pas d'étages bien distincts comme le voulait la tradition avec l'étage à vivre, l'étage à dormir ou l'étage "technique". Chaque pièce, de taille et de hauteur différente selon sa fonction, est agencée le long d'un escalier central, comme une spirale qui se déroule au milieu de la maison. La villa Müller compte environ 15 plateaux, y compris les espaces techniques que Loos détestait concevoir et qu'il confiait à ses collaborateurs. Cette organisation en hauteur est née aussi de la configuration du terrain, tout en pente, au bord d'une des nombreuses collines de Prague.

Peu d'ouvertures du côté rue comme vous pouvez le voir sur la photo. Toute la lumière entre par l'arrière qui donne sur une magnifique vue de Prague, en particulier sur la Cathédrale, le Palais Trojá et le Jardin Botanique. Quand on visite la villa, on se rend vite compte que Mr. Müller devient être bien riche pour se permettre non seulement le concours de Loos, mais aussi des marbres suisses colorés de verts et de bleus, des bois précieux, des tapis persans ou encore de la robinetterie directement importée d'Angleterre. L'heureux propriétaire avait fait fortune dans le béton armé qu'il introduisit en Tchécoslovaquie et qu'il vendra abondamment à l'Etat pour construire un mur de protection vis-à-vis de l'Allemagne. Sa maison sera aussi une vitrine consacrée à l'art du béton armé.

Comme toutes ces prestigieuses villas, celle-ci a été malmenée par les communistes. Ils ont presque réussi à la ruiner de fond en comble. Mais de courageux amateurs d'histoire et des fonds européens ont permis de restaurer la villa, y compris ses meubles et décorations. Et quand il était impossible de retrouver les originaux, des copies conformes ont été mises en place. Comme souvent depuis l'Art nouveau, l'architecte est aussi un designer qui conçoit chaque élément de la maison, qu'il soit décoratif ou plus technique.

Magnifique travail de restauration qui rend hommage à Loos et à son art subtil qui doit encore un peu à l'Art Nouveau mais qui s'en détache en le simplifiant et y ajoute une touche British qu'il affectionnait. La villa appartient aujourd'hui à la ville de Prague. Un gardien y habite dans l'ancien studio du chauffeur de Müller, visiblement l'employé de maison le plus important.


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