mercredi 6 novembre 2013

Le vieux cimetière juif de Prague

En mettant de l'ordre dans ma paperasse, je m'aperçois que je n'ai pas parlé de notre visite (partielle) diurne du quartier juif. C'était il y a quelques mois avec des invités.

Pour l'origine du quartier, voyez notre post sur la visite nocturne du coin. La journée, surtout au mois d'août, c'est surpeuplé de touristes et les files se forment un peu partout. Mais le soleil brille et l'attente permet de papoter à son aise.

Première observation, un prix d'entrée unique pour tout. Donc prix max même si une seule visite est souhaitée, comme par exemple celle du fameux vieux cimetière juif, sur lequel la petite troupe avait jeté son dévolu. On dira que c'est notre contribution à l'entretien de tous ces lieux de culture qui comprennent donc le cimetière, les synagogues Vieille-Nouvelle, espagnole, Maisel, Pinkas, Klaus et la Salle des cérémonies.

La salle des cérémonies, avec à gauche la sortie du cimetière
Pour arriver au cimetière, il est obligatoire de passer dans la synagogue Pinkas, édifiée par la famille Horovic en 1535. Depuis les années 1950 elle est le coeur du Mémorial des Juifs de Bohème et de Moravie victimes des atrocités nazies. Les noms des défunts sont inscrits (par ville) sur les murs, du sol au plafond, représentant une extension symbolique de l'ancien cimetière juif, une sorte de sépulture pour ces victimes qui n'en ont jamais eue. Premier moment difficile.


Puis, au premier étage, une exposition permanente de dessins d'enfants détenus à Terezín, 1942-1944. La plupart de ces enfants ont ensuite été déportés à Auschwitz avec le destin que l'on connaît. Deuxième moment insoutenable. Je m'effondre très vite et je dois sortir, tellement la souffrance m'envahit. Terezín, en République tchèque, n'était pas un camp d'extermination comme Auschwitz mais un camp de travail et de "triage". La différence est mince car les conditions de "vie" y étaient atroces. Travail, forcé, malnutrition, maladies, souffrances faisaient le même travail que le gaz. C'est là qu'un de mes poètes favoris, Robert Desnos, est mort du typhus en juin 1945. Un des ses poèmes :

J'ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé,
Couché avec ton fantôme
Qu'il ne me reste plus peut-être,
Et pourtant, qu'à être fantôme
Parmi les fantômes et plus ombre
Cent fois que l'ombre qui se promène
Et se promènera allègrement
Sur le cadran solaire de ta vie.

Le vieux cimetière, en comparaison, est paisible et inoffensif. La plupart de ses habitants sont sans doute morts en toute humanité. Son plus vieil habitant est le poète et lettré Avigdor Karo, mort en 1439. Les enterrements y ont été organisés jusqu'en 1787. Le lieu compte environ 12.000 pierres tombales, superposées en 7 couches. Comme le lieu est exigu, chaque fois que le cimetière affichait complet, on amenait de la terre pour recouvrir le tout et recommencer une "couche" de sépultures... avec des tombes plus anciennes émergeant partiellement parmi les plus récentes, d'où cet enchevêtrement que l'on voit sur toutes les photos.



Un autre passager célèbre est Judah Loew ben Bezalel, plus connu sous le nom de Rabbi Loew, décédé en 1609, célèbre car associé à la légende du Golem. Cette créature de boue animée par le nom de dieu fera l'objet d'un post ultérieur.

Deuxième observation. Quand j'ai visité le cimetière pour la première fois, juste après la chute du mur, on pouvait circuler librement dans tout le cimetière. Aujourd'hui, face aux hordes de touristes, le chemin a été balisé et longe les murs, sans plus.


Mais le lieu garde malgré tout un charme très particulier et dégage une belle sérénité malgré le méli-mélo des pierres tombales et les touristes qui vous poussent dans le dos...


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